Page 7 - Programme Festival #8
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Du PEtit SaLoN
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au
30 Dans mon travail, le rapport tendu des clairs et des sombres, de la
lumière et de l’ombre, ou, autrement dit, du bien et du mal, de
l’esprit et de la matière, de la connaissance et de l’ignorance
M constitue bien le portrait de l’homme que je veux peindre. Cet
homme si fasciné par le divin et tenté à la fois par la bestialité.
a Les boîtes sont apparues assez tardivement dans mon travail de
peintre, comme un prolongement naturel et nécessaire, et en sont
devenues un élément indissociable, son double ludique. Comme
une réminiscence de mon désir d’adolescent de faire du théâtre, et
r peut-être même, venant de plus profond encore, de jeux d’enfant
entre batailles rangées de figurines et trains électriques installés
sous la table de la salle à manger familiale. Je me souviens aussi de
s la noirceur du garage où mon père, mécanicien, travaillait. Je me
souviens surtout comment, enfant tout jeune, je fus choqué de voir
les photos des camps de concentration, leur installation
méthodiquement mortifère, les monceaux de corps et les grands tas
2 d’objets volés soigneusement triés et récupérés…
Je comprenais que les livres brûlés étaient la métaphore
0 douloureuse de la vie des hommes, à la fois esprit et matière, voués
inexorablement à leur destin. Car non seulement les livres, comme
les hommes, peuvent être brûlés, mais parfois aussi, par la
connaissance transmise, ils nous brûlent, nous métamorphosent,
2 nous guident ou nous égarent.
Chacun y verra, de la blancheur des livres aux noirs égouts, un
cheminement, un va-et-vient constant entre les deux pôles majeurs
5 de l’Homme : la bestialité et la transcendance, la fragilité humaine Marc GIAI MINIET
et la divinité inaccessible.
Peintre, graveur, il élabore également depuis de nombreuses années des constructions de matériaux divers qu’il appelle
« boîtes», ne sachant pas les nommer autrement.
Ces constructions semblent préciser de manière obsessionnelle sa pensée sur l’humanité, sur l’étrange humanité et complètent
son univers borgésien et kafkaïen